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Remerciements

Journal du Jura  /  4 juin 2022

Otto Borruat s’en est allé

Instituteur, maire, correspondant, officier d’état civil et on en passe, cette personnalité laissera un grand vide dans la région

Agé de 83 ans, malade depuis longtemps et entré dans le rang avec regrets depuis bien moins longtemps, Otto Borruat a rendu son dernier soupir à son domicile, plongeant sa chère épouse et sa famille dans l’affliction.

Otto Borruat, c’était un personnage que nul ou presque ne pouvait ignorer, non seulement dans sa commune de Courtelary, mais également dans l’ensemble du vallon de Saint-Imier.

Au chef-lieu, cet Ajoulot d’origine a rempli une pleine carrière d’instituteur dans le vénérable collège du lieu, c’est dire à quel point sont innombrables les générations d’élèves qui ont usé leur fond de culotte sous sa houlette. Toujours prêt à payer de sa personne, il a perpétué la tradition voulant que le régent donne une partie de son temps pour la communauté.

Précieux correspondant du jdj

C’est ainsi qu’il a été correspondant de divers journaux, dont bien sûr le Journal du Jura durant une grosse vingtaine d’années et jusqu’à tout récemment. Sa disponibilité ne s’arrêtant pas là, Otto Borruat s’est également impliqué en tant qu’officier d’état civil et dans de nombreuses sociétés, de même qu’il a été longtemps membre du Conseil municipal et vice-maire pendant 11 ans. Par rapport à la Question jurassienne, il faisait partie de la minorité qu’il se faisait fort de représenter avec conviction mais toujours dans le respect de ses adversaires politiques.

Les tensions apaisées, Otto Borruat a accédé à la mairie et en a occupé le fauteuil durant 12 années avant d’être battu en 2012 par le maire actuel, Benjamin Rindlisbacher. Cet échec lui a fait mal. Il se savait déjà un peu usé par la fonction, mais le projet de fusion de communes était toujours en cours et celui qui en a été une cheville ouvrière aurait souhaité mener sa mission jusqu’à son terme.

Ancien maire de Renan, Andreas Niederhauser l’a beaucoup côtoyé et fortement apprécié dans ce groupement de maires ayant œuvré pour la tentative de fusion, que le peuple a finalement refusée. « Je crois me souvenir qu’il occupait le secrétariat du Copil. Ce serait parfaitement logique, sachant qu’Otto ne rechignait jamais à s’investir dans un poste que personne ne souhaitait et qu’il avait la plume facile. Otto n’était pas du genre à regarder ailleurs quand il fallait trouver un volontaire. »

Otto Borruat, très bien connu et apprécié dans notre rédaction comme ailleurs, laissera un grand vide parmi ceux qui ont vécu de près ou de loin l’actualité du vallon de Saint-Imier.

Salut l’ami et bon vent là où tu t’en vas.

BLAISE DROZ

Feuille d’Avis de Courtelary / 24 juin 2022

Hommage à Otto Borruat, touche-à-tout qui a marqué son temps

Ce 2 juin, sur le coup de midi, un véritable séisme s’abat sur le Chef-lieu et alentours. Otto Borruat n’est plus. L’annonce de son décès se répand comme une traînée de poudre, provoque des cercles concentriques, ainsi que le ferait la chute d’un galet dans l’eau calme de l’étang. Très vite, ils se répandent, touchent la famille, les amis proches, puis une population de plus en plus large.

Une première vague atteint des centaines d’anciens élèves passés sous la férule exigeante de M. Borruat. Nommé en 1958, il avait juste 20 ans, à la tête de cette fameuse 4e année, anxiogène entre toutes, où se décide l’obtention du fameux ticket d’entrée à la sacro-sainte école secondaire. Ses premiers élèves avaient 10 ans. Aujourd’hui, ils ont 70, 60, 50 ans. Quels souvenirs gardent-ils encore de leur maître ? « Avec lui, j’ai aimé le français, la gym, s’exprime Roger, alors que Francine prétend n’avoir rien compris aux maths ». Tant d’autres témoignages surgissent au fur et à mesure que se répand la triste nouvelle. Les bons souvenirs, plus nombreux, se mêlent aux moins bons. Trente années d’enseignement laissent des traces indélébiles dans une communauté.

Au-delà du prof apprécié qu’il fut, Otto Borruat a marqué les esprits en tant que conseiller communal durant 20 ans (1ère élection en 1965), il avait alors 27 ans, puis en tant que maire durant 12 ans (élu en 2004, réélu en 2008 et 2012). Que de séances plus ou moins longues à présider, de décisions à prendre, d’avis à trancher sous sa responsabilité. Que de journées, de soirées aussi consacrées à la vie de la cité, souvent prolongées comme il se doit par le fameux quart d’heure vaudois. Un moment de détente bienvenu pour apaiser le corps et l’esprit. Surtout les soirs où le budget a été enfin accepté, que le crédit pour tel ou tel projet a passé la rampe au terme de longues palabres. Cela mérite bien un petit verre de Chasselas. Peut-être deux.

La mort subite d’Otto Borruat, du citoyen actif, omniprésent qu’il a été durant cinq décennies éveille inévitablement mille souvenirs parmi la population. C’est la deuxième onde de choc.

La troisième touche le monde de la culture, du Clos Bernon particulièrement dont il fut un des membres fondateurs. Les chanteurs du feu chœur d’hommes l’Avenir qu’il a dirigé quelques années. Immanquablement, le syndicat régional des enseignants qu’il eut l’honneur de présider est aussi très choqué. Actif dans la région, il le fut tout autant au sein de la SPR, Société Pédagogique Romande, notamment dans la commission pour l’introduction de l’enseignement renouvelé du français. Un thème passionnant pour cet amoureux de la langue française.

La fin d’Otto Borruat est aussi celle d’une plume qui s’envole dans le vent. Une plume fine, sensible, féconde, avisée qui aujourd’hui prive les lecteurs du Journal du Jura, du Quotidien Jurassien, de la Feuille d’Avis du District de Courtelary, de l’Impartial à l’époque. Une plume qui manquera aussi aux nombreuses sociétés, fondations et autres associations. Son aisance, sa culture, son amour de l’écriture, son sens du service, l’appelaient fatalement à devenir un secrétaire précieux et apprécié. Notamment du Centre éducatif et pédagogique dont il fut longtemps secrétaire, puis président du Comité de direction.

A l’origine de ce foisonnement d’activités, il y a l’homme, l’époux, le père de famille, le grand-père. L’homme dans toute sa complexité, avec ses forces et ses faiblesses, ses états d’âme, ses joies, ses souffrances. Otto ne fut pas épargné par ces dernières. Il a su lutter avec un courage admirable, une volonté exemplaire pour surmonter une addiction destructrice. Une monstre saleté, rappelle Denise, son épouse, admirable de patience, de compassion et d’amour. Vaincu dans une première phase de la maladie, Otto s’en sortit finalement vainqueur, digne, la tête haute au terme d’une âpre lutte.

L’année 2016 mit brutalement fin à une fructueuse carrière politique, alors que de nombreux projets étaient sur la table. Est-ce au lendemain de cette cruelle désillusion qu’Otto relève les mots du musicien Thaca, dénichés dans une poche de sa veste : « Et maintenant, le voyage est fini. Trop court pour durer, trop court. Il a été rempli d’aventures, et de sagesse, de rire et d’amour, de galanterie et de grâce ».

Si le coup a été rude, Otto sut aussi s’en remettre. Lutter faisait partie de sa philosophie. Il en a fourni la preuve tout au long de sa vie. Sur son bureau se trouve le dernier livre du philosophe Alexandre Jollien. Le meilleur choix. Homme de culture, Otto était un lecteur assidu. Il suivait de près l’actualité du monde, l’actualité littéraire, tout en se passionnant pour l’Histoire. Tant celle du 20e siècle que celle qui s’écrit avec un grand H.

Chaque jour, à l’aide de son déambulateur, il se rendait à la Clef où il rencontrait quelques amis de sa génération autour d’un café. L’occasion pour eux de se rappeler des souvenirs de jeunesse, de commenter les événements récents, un match de foot ou de hockey, les années qui filent trop vite, les méfaits de l’âge. Vers midi, il retrouvait Denise pour un repas frugal. Certains jours, ce sera une blanquette de veau, son menu préféré.

Dans quelques semaines, le choc provoqué par la mort d’Otto Borruat sera apaisé. Restera le souvenir d’un homme affable, généreux qui a beaucoup donné, jusqu’à la limite de ses forces, à son village, à son prochain, à d’innombrables sociétés.

Permettez que je rappelle encore qu’Otto Borruat a fonctionné comme officier d’état civil pour Courtelary-Cormoret (1981/1982), qu’il fut président de la Société d’ornithologie Courtelary/Cormoret, président du comité d’organisation de la Fête du village, membre du comité de l’Envol, centre spécialisé en alcoologie, président de la Caisse Raiffeisen de Courtelary (1974).

C’est à un fidèle serviteur de l’état, à un ami que nous disons aujourd’hui définitivement adieu. Merci Otto, repose en paix.

DENIS PETITJEAN

Journal du Jura / 14 octobre 2021

Le sceptre et la plume

OTTO BORRUAT Il ne compte plus les associations qu’il a présidées ou galvanisées, l’ex-maire de Courtelary. Surtout, il a assuré la chronique de son Vallon pour Le JdJ durant plus de 20 ans.

Décidément, comme le temps passe ! N’empêche ! À 83 ans bien sonnés, Otto Borruat fait toujours étalage d’une lucidité et d’une vivacité d’esprit impressionnantes. Même si, pour des raisons de santé, il a dû renoncer à incarner Le JdJ dans son fief de Courtelary, mais aussi dans tout le Vallon.

Fidèle à notre journal, l’ancien instituteur qui a passé toute sa vie professionnelle dans l’école de son village, dont quelques années à la direction ? Que nenni ! On l’avait oublié – décidément, on vieillit aussi – mais ce grand personnage a aussi prêté sa plume à l’Impartial, au Démocrate et au Jura bernois, notamment. Des publications certes prestigieuses, mais disparues aujourd’hui. Devrait-on y déceler comme l’once d’une forte légitimité et d’un puissant ancrage du Journal du Jura dans son fief historique et naturel ? Allez ! Foin de flagorneries, tant il est vrai que le sujet du jour est bien Otto Borruat. Avant de poursuivre sur cette voie du modeste panégyrique, un furtif coup d’œil à son curriculum vitae vaut mieux que n’importe quel torrent d’éloquence. Après son école normale à Porrentruy, l’homme a exercé son métier d’instituteur à Courtelary jusqu’à la retraite. Une fidélité peu commune, qui prouve que l’enfant de Chevenez ne s’est pas trop senti dépaysé dans ce Vallon, quand bien même ses opinions politiques lui ont valu quelques désagréments durant les années de braise. On y reviendra, sans pour autant forcer sur ce trait-là. Membre d’innombrables associations liées au corps enseignant, officier d’état-civil de l’arrondissement, actif auprès de Pro Juventute et d’institutions vouées aux œuvres sociales, il revendique surtout la présidence de la Fédération du Jura bernois des sociétés théâtrales d’amateurs, où il a évidemment croisé une certaine Janine Houmard, autre correspondance historique du JdJ à laquelle nous avons rendu un récent hommage. Surtout, Otto Borruat appartient au cercle restreint des maires assumant cette fonction de correspondant pour le compte du JdJ. Allusion émue – pourvu qu’on n’oublie personne ! – à Yvan Kohler, de Romont, et Manfred Bühler, de Cortébert. Mélange des genres, persifleront quelques complotistes de pacotille. Que nenni ! Plus prosaïquement, l’ardent besoin de servir sa communauté. C’est aussi simple que ça.

Otto Borruat, lui, s’est retrouvé dans la peau du correspondant régional par amour de la langue française et de l’écriture. Il a commencé cette carrière-là quand l’ordinateur n’existait pas. Malédiction : les nombreuses publications auxquelles il prêtait sa plume exigeaient presque toutes une copie originale. Stencils, vade retro, pour ceux qui savent encore ce que ce terme signifie. Corollaire, même si les textes étaient parfois identiques, il devait les écrire quatre ou cinq fois ! Il se souvient aussi d’avoir apporté tard dans la nuit ses écrits dans la boîte aux lettres d’un journal ou d’un autre.

En plus de la chronique locale proprement dite, notre homme faisait bénéficier nos lecteurs de sa grande culture : « On me sollicitait pour des sagas historiques », se souvient-il. Ses contacts avec Le JdJ ? Ils passaient surtout par les incontournables secrétaires de rédaction. Soit l’heureux retraité Michel Spichiger et désormais Marcello Previtali, « mon ancien élève ».

Maire pendant trois législatures de Courtelary, Otto Borruat s’est toujours efforcé d’être impartial et de bien distinguer ses deux fonctions. Cela ne lui a d’ailleurs valu aucune critique. Il se souvient par contre de ces assemblées de sociétés qui duraient bien trois heures et auxquelles le correspondant était tenu d’assister, sous peine de flagellation. Si vous faisiez partie du tir, de la fanfare ou de la Société de développement, sûr que vous devriez lui vouer une reconnaissance éternelle ! Songez ! Toutes ces heures de présence tardive pour, parfois, quelques fugaces lignes publiées, seulement…

L’échec de la fusion

La politique, dans tout ça ? Purement locale. Conseiller municipal, puis vice-maire durant 11 ans jusqu’en 1976, il avait alors tenté une première offensive à la mairie. Hélas, en cette période post-plébiscitaire, on avait fait payé à ce non-violent convaincu ses sympathies autonomistes. Le retour à la normalité lui a toutefois permis de décrocher la timbale pour trois mandats consécutifs jusqu’en 2012. « Je n’aurais alors pas dû postuler pour un quatrième tour de piste, analyse celui qui fut battu lors de ce combat-là. Mais j’avais à cœur de terminer mon travail sur la fusion, fusion qui a hélas échoué. Je crois que la messe est dite pour un bon bout de temps. »

Alors, Otto Borruat ne s’intéresse plus trop à la politique. Il peut désormais consacrer davantage de temps à sa chère épouse, mais aussi à ses passions, la lecture, la musique et les mots croisés.

Malheureusement, il n’est pas parvenu à nous dénicher un successeur. Le temps des vrais correspondants de village serait-il passé, à l’image de celui des dinosaures ? Pour un journal comme le nôtre, une perte inestimable.

PIERRE-ALAIN BRENZIKOFER

 

 

Association des camps de vacances du district de Courtelary – Beau-Soleil – Route de la Cité 8 – 1854 Leysin